Effets de l'urbanisation sur la faune

Aller en bas

Effets de l'urbanisation sur la faune Empty Effets de l'urbanisation sur la faune

Message par Invité Sam 28 Oct - 16:37

Par Corinne BENSIMON selon les études de Philippe Clergeau, chercheur à l'INRA
QUOTIDIEN Libération du samedi 28 octobre 2006


Existe-t-il un profil type de l'«espèce sauvage urbaine» ?
Dans une certaine mesure. En effet, toutes les espèces ne sont pas égales face aux contraintes urbaines. La ville fonctionne comme un filtre de la biodiversité rurale. Dans toute la zone tempérée, les villes offrent un environnement caractérisé par certaines contraintes : température plus élevée que la moyenne locale, habitats fragmentés, nourriture abondante, lumière nocturne, sols remaniés, très perméables, bruit et mouvement. Confrontées à ce filtre, certaines espèces ne pourront jamais entrer dans la ville, tandis que d'autres y prospèrent.

Lesquelles ?
C'est l'un des axes majeurs du programme Ecorurb que nous menons avec un réseau de dix équipes pour identifier les effets de l'urbanisation sur la biodiversité locale. Il est clair que les animaux omnivores ­ plutôt de petite taille ­ s'en sortent mieux que les insectivores, de même que sont favorisées les plantes supportant les grosses concentrations de carbone ou de sel. Ce filtre est si puissant qu'il y a une homogénéisation de la biodiversité dans les villes tempérées d'Europe ou d'Amérique : les espèces majeures ont le même profil, et certaines, introduites par l'homme aux quatre coins du monde, sont même devenues typiques du milieu urbain. On trouve ainsi des moineaux, étourneaux ou pigeons bisets à peu près partout.
Pourquoi des espèces sauvages viennent-elles s'installer en ville ?
Les villes, en Europe, ont énormément changé au cours des trente dernières années. On y a planté énormément d'arbres, on a aménagé les promenades des fleuves qui les traversent, créant une continuité avec la campagne. Les espèces capables de passer le filtre urbain sont alors arrivées en nombre pour profiter des ressources abondantes de la ville et de leurs banlieues. Les pigeons ramiers viennent désormais nicher dans les parcs, les étourneaux font des dortoirs, et les renards sont de plus en plus nombreux. C'est frappant dans les agglomérations de taille moyenne. Alors que les musaraignes ont beaucoup de mal à se déplacer sur le territoire fragmenté des centres-ville, le nombre d'espèce d'oiseaux, en revanche, n'y est pas tellement inférieur à celui du milieu rural. Cela nous amène à penser que la ville devient plus hospitalière ces dernières années, même si la pollution, le piétinement, le morcellement sont tels que certaines espèces ne viendront jamais s'y installer.
En ville, les bêtes changent de mode de vie ?
En effet. Par exemple, à Nantes, on a suivi des renards, par radio-tracking : ils arrivent en suivant la Loire et gagnent des espaces verts ou des lotissements avec jardins. Ils mangent comme en campagne des mulots, mais ils font aussi les poubelles. Puis, au lieu de creuser des terriers, ils s'installent dans des bosquets de fleurs. On en a vu y dormir le jour, malgré les bruits d'enfants. Autre exemple d'adaptation, le faucon crécerelle. A la campagne, il ne mange que des musaraignes ou des campagnols. En ville, il s'est mis au moineau. Le chat, animal territorial, accepte de vivre en bande, en milieu urbain, pour profiter d'un nourrisseur. Quant aux fauvettes, elles chantent plus fort pour se faire entendre.
La mortalité est forte tout de même, dans ces populations urbaines...
La voiture est redoutable pour les hérissons et de nombreuses autres espèces. Mais le principal prédateur, c'est le chat. Pour tous les petits mammifères et surtout pour les lézards qu'il a quasiment fait disparaître de certaines villes.
Et peut-on imaginer, à l'inverse, que la nature des villes modifie la nature de la campagne ?
On observe déjà ce phénomène. Les étourneaux qui viennent en ville se comportent différemment quand ils reviennent à la campagne. Ils se rapprochent des décharges et de la lumière. Mais le plus frappant, c'est l'impact des espèces exotiques relâchées en ville. La tortue de Floride dont les gens se débarrassent dans les étangs est en train de s'installer dans les fleuves où elle se reproduit, du moins au sud de la Loire. L'agressif cygne tuberculé, ornement des lacs urbains, fait fuir les canards à la campagne. Et, à Londres, les perruches prolifèrent : que se passera-t-il quand elles s'installeront au vert ?

Invité
Invité


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum